Au soleil couchant*
Au soleil couchant
très haut, très loin il galope
sur le lion de pierre
Au soleil couchant
très haut, très loin il galope
sur le lion de pierre
À flanc de falaise
roses et bleus du soir – ces ombres
croisées sur un banc
Dans mon bureau seule
j'ignorais que le silence
ferait tout ce bruit
Terrasse en octobre
café croissant confiture
et passants qui passent
Feuilles givrées d'or
dans la nuit tant de lumière
et pourtant il pleut
Ne sont plus que deux
ces trois garçons dans la neige
pourquoi grand-maman
Lumière à l'étable
vers la chaleur de la traite
mes pas dans la boue
Feuilles rouges et or
maisons, chemin, étang noirs
si vive lumière
Dans les feuilles mortes
jeune homme au tout petit chien
son sourire immense
Marchant dans la rue
ils vaquent à leurs affaires
une feuille court
Un bateau de papier
Comme un chapeau
Sur l'eau courante
Ira-t-il en voyage
Ou sera-t-il stoppé
Par les roches
Par les branches tombées
Un bateau qui danse
Et l'eau qui lève son chapeau
Dans les rapides
Un bateau qui sombre
En rêvant du Mexique
Un artichaut dans un poème
En tapinois fit son entrée
Quoique le poète
Un type très comme il faut
Et correctement cravaté
(Ou était-ce une poétesse)
Ne fût pas très chaud
À cette idée
Se croirait-on devant moi
Sur un tapis à la noix?
Qu'il lui lança, courroucé
Les frustes frusques que voilà!
Et ce nom que vous portez
Surtout, surtout n'en parlons pas!
Tout serait-il donc permis?
Ma foi oui
Que l'artichaut répondit
Et le poète capitula
Aurore boréale
La nuit a la saveur fondante
Des guimauves grillées
Un hibou l'autre été
Fut élu maître du monde
(De son petit univers forestier, entendons-nous)
Par huit cent trente-neuf épinettes
Environ
Et quatre cent soixante-dix millions
Vingt-deux mille
Sept cent cinquante et un maringouins et trois quarts
La belle affaire! me direz-vous
Et vous aurez raison
Les dernières feuilles
Et les premiers flocons
Dans un ciel indécis
Se défient
L'espace d'une hésitation
D'une valse à deux temps
Ils se font des pieds de nez
Et tombent en riant
Pour la suite des choses
Une muse fort discrète
Soufflait si bas
À l'oreille du poète
Que le pauvre n'entendait rien